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Visionnaire


Il a été constaté par maint analystes de la crise que celle-ci n'était pas advenue sans que quelques rares experts, économistes ou financiers, aient averti, dès 2007, des risques qui menaçaient l'économie et la finance aux Etats-Unis, et partant, dans le monde : risque de récession, anticipation de l'effondrement des prix de l'immobilier, éclatement de la "bulle de crédit", dérive des marchés financiers etc.

Un de ces économistes, par exemple, avait prévenu dès la fin de 2006 des risques de récession aux Etats-Unis, et averti début 2008 d'un risque d'aggravation de la crise en décrivant un scénario en douze étapes avec faillites de hedge funds, de banques et la nécessaire intervention des autorités étatiques... ce qui est arrivé. Quelques gestionnaires de fonds avaient également anticipé très tôt le début des difficultés du système financier international.

On a qualifié après coup ces experts avisés de "visionnaires" : on voulait simplement dire qu'ils ont eu la capacité d'anticiper ce qui allait arriver dans la logique interne du système. C'était plutôt des prévisionnistes. Ils ont fait preuve de clairvoyance et de discernement grâce auxquels ils ont pu prévoir l'évolution du système, sans le remettre en cause.

Est visionnaire celui qui porte sur la réalité un regard différent parce que inspiré d'une vision plus large de l'avenir. Le visionnaire à la fois voit les failles du système, ses effets destructeurs, et voit justement là l'opportunité d'une nouvelle création.

Un texte m'est revenu à la mémoire, d'André Gorz, qui anticipe lucidement la crise :

"Une industrie financière se constitue qui ne cesse d'affiner l'art de faire de l'argent en n'achetant et ne vendant rien d'autre que diverses formes d'argent. L'argent lui-même est la seule marchandise que l'industrie financière produit par des opérations de plus en plus hasardeuses et de moins en moins maîtrisables sur les marchés financiers. La masse de capital que l'industrie financière draine et gère dépasse de loin la masse de capital que valorise l'économie réelle [...] L'économie réelle devient un appendice des bulles spéculatives entretenues par l'industrie financière. Jusqu'au moment, inévitable, où les bulles éclatent, entraînent les banques dans des faillites en chaîne, menaçant le système mondial de crédit d'effondrement, l'économie réelle d'une dépression sévère et prolongée".

Ce texte n'est pas celui d'un expert en économie ou en finance, mais il prend sens à partir de la vision qu'André Gorz développe dans son oeuvre d'un monde nouveau dans lequel l'humain est au centre et autour duquel s'ordonnent l'économie et la finance. André Gorz était un visionnaire.

PS  Les lignes que je cite sont extraites d'un texte qu'André Gorz a terminé d'écrire le 17 septembre 2007, pour la revue EcoRev', publié depuis dans son livre posthume Ecologica sous le titre "La sortie du capitalisme a déjà commencé". André Gorz nous a quittés le 22 septembre 2007.







19/09/2009
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