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Zérolument vôtre


Un ami (d'un groupe de philo !) m'a soumis la suite ci-dessous, me demandant où était la faille :

   * Soit a et b deux réels non nuls, on pose :  a = b
   * On multiplie chaque membre par a :  a² = a x b
   * On soustrait b² :  a² - b² = a x b - b²
   * On factorise chaque membre :  (a - b) x (a + b) = b x (a - b)
   * On divise par (a - b) :  a + b = b
   * Soit :  2 x b = 1 x b
   * On divise par b :  2 = 1


Cela ressemble à l'équation : le pays ne va pas bien, donc les agences de notation dégradent la note, donc le pays va encore moins bien etc.  Il doit y avoir une faille là-dedans.

Mais revenons au premier problème. Si faille il y a, c'est sans doute dans la division par (a - b), car comme a = b, alors a - b = 0, donc on divise par 0, et cela est interdit.

Interdit, mais pourquoi ?

 

On comprend que plus on divise un nombre, placé au numérateur, par un nombre, placé au dénominateur, supérieur au numérateur, plus le résultat sera un nombre inférieur au numérateur. Diviser 1 par 2 donne 0,5. 1 par 3 donne 0,3333 etc. Bien. Si maintenant on divise le numérateur par un nombre inférieur à celui-ci, le résultat cette fois-ci sera un nombre plus important que le numérateur. Diviser 1 par 0,5 donne 2. etc.

On voit le problème des limites. Plus le dénominateur est petit, plus le résultat est grand. Si le dénominateur approche de zéro, le résultat approche de l'infini. Qu'est-ce qui se passe si le dénominateur égale zéro ? Les mathématiciens n'aiment pas. Ça leur échappe. Est-ce pour cela qu'ils interdisent l'opération ?

Somme toute, est-ce que la vie ne serait pas plus simple si on pouvait, comme cela, sans autre forme de procès, interdire ce qu'on n'aime pas ? (Par exemple... mais passons.)  

Mais là on parle du zéro ! Ce n'est pas rien.

Il faut bien réaliser qu'on s'est longtemps passé  du 0. Les Romains ne le connaissaient pas. (C'est bien pour cela que le calendrier grégorien - base de notre système de comptage des années - ne connaît pas l'année zéro : c'est ainsi que le troisième millénaire, et le XXIe siècle, ont commencé, on s'en souvient, non le 1er janvier 2000 mais le 1er janvier 2001, de quoi laisser perplexe plus d'un.)

Le zéro nous serait arrivé de l'Inde (encore eux) via les mathématiciens arabes, vers le VIIIe siècle. Une introduction assez tardive donc. Le mot indien désignant le zéro était sunya, qui veut dire "vide", "espace" ou "vacant" : de quoi faire le bonheur des mathématiciens.

Le zéro est utilisé comme notation des bases 2, 8, 10, 12, 60  etc. Dans la base 10, qui est celle dont nous nous servons, le chiffre le plus à droite indique les unités, celui placé immédiatement avant, les dizaines, le troisième, les centaines etc. Si le nombre de dizaines n'est pas entier (par exemple 3,4), le chiffre des unités (4) permet de comprendre que l'autre chiffre (3) indique les dizaines.

Mais que faire si le nombre des dizaines est entier (par exemple trois dizaines) ? C'est là que le caractère zéro trouve sa place ! Le 0 placé à droite du 3 permet de comprendre que "30" signifie "trois dizaines". Voilà qui vient astucieusement compléter le système des chiffres dits arabes - lesquels vont de 1 à 9.

Et les Romains, dira-t-on, comment s'y prenaient-ils, en l'absence du zéro ? En fait, ils n'avaient pas besoin de cet artifice/notation, puisque avec leurs caractères dits romains bien sûr, les unités (I,V), les dizaines (X,L), les centaines (C,D) et les milliers sont notés avec des signes différents. Pas fous ces Romains !

L'invention du zéro ne s'arrête pas là. Le zéro permet aussi d'exprimer l'absence de quantité par un nombre. Ce qui n'est pas évident en soi. Quand on dit : "Ne pensez à rien !", c'est sûr qu'on pense comme à quelque chose, qui serait "rien". Parménide l'avait bien compris qui affirmait résolument qu'on ne peut penser que l'être.

Toute cette histoire pour conclure que le zéro comme notation est un artifice pour "vide". Et qu'on ne peut diviser par "vide". Voilà où était la faille des équations. (Pour ce qui est des agences de notation, je ne sais où est la faille mais elle doit bien exister.)

 

 

Suivez-moi sur Twitter : @voilacestdit






15/12/2011
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