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De la Silicon Valley à travers le dire d'Axelle Lemaire

 

 
Tout juste de retour d’un séjour familial à Palo Alto au coeur de la Silicon Valley,  je découvre le « buzz » suscité par les propos d'Axelle Lemaire, la (jeune) secrétaire d’Etat au numérique, déclarant dans une interview que « la France n'a pas de leçon à recevoir de la Silicon Valley ». Les réactions ironiques sont nombreuses : bien sûr la France est la meilleure etc.  Je pense que la secrétaire d’Etat voulait simplement dire qu’il y a d’autres endroits que la Silicon Valley où se conçoit le numérique d’aujourd’hui et de demain, comme la France souhaite-t-elle.
 
Reste que, dits comme cela, ses propos sont pour le moins maladroits. La Silicon Valley ne se préoccupe guère de faire la leçon à qui que ce soit, surtout pas à la France, dont on ne parle pas beaucoup là-bas - mais on ne peut dire qu’on n’a rien à apprendre de la Silicon Valley. Bien sûr qu’il y a à prendre en termes de libre entreprise, d’inventivité, de conditions de créativité, d’esprit d’émulation, de système d’incitation, de milieu pluri-national etc. Mais tout n’est pas à prendre. 
 
Je rejoins plus Axelle Lemaire lorsqu’elle explique qu’elle n’est pas « sûre non plus que la Silicon Valley joue un rôle exemplaire dans la transformation numérique plus globale de toute l'économie et la société au bénéfice de tous ». 
 
De fait ce qui frappe là-bas ce sont les fortes inégalités : les très riches d’un côté, les pauvres de l’autre. Quand je dis : « d’un côté, de l’autre », c’est à entendre physiquement :  À Palo Alto par exemple, on ne voit pas de pauvres, pas de latinos etc. : ils logent tous de l’autre côté de l’autoroute, la fameuse Highway 101, à East Palo Alto, une autre city, un autre monde que Palo Alto [Palo Alto est l'une des city les plus riches de Californie, East Palo Alto l'une des plus pauvres], au-delà du mur, de la barrière que constitue la 101.
 
La solidarité n’est pas fondamentalement une valeur. Elle s’exerce au coup par coup mais n’inspire pas le modèle social. Le même modèle social fait exploser le prix des logements réservés aux happy few jetant à la rue à San Francisco des hordes de sans-abri. 
 
Le monde qui se construit dans la Silicon Valley est paradoxal : il est à la fois très ouvert (ouvert à toutes les idées, ouvert à toutes les nationalités) et très fermé (fermé sur lui-même comme serait un centre du monde qui ignorerait le monde), une sorte de bulle en fait. Mais les bulles finissent généralement par éclater.
 
Bref, la France a certainement beaucoup à apprendre de la Silicon Valley, il serait prétentieux et faux d’affirmer le contraire. Mais tout n’est pas à prendre : en particulier pas le modèle social.


13/12/2014
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