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Sous les ors de la République

 

 

Lors des dernières Journées du patrimoine j'ai eu l'occasion de visiter l'Hôtel de ville de Paris. Cela n'a pas été sans me poser quelque question sur les limites de l'exercice démocratique dans l'apparat monarchique.

La République française, comme on sait, vit, et vit fort à son aise, dans les palais de la monarchie :

- L'Élysée, dans le palais de L'Élysée, construit en 1720 pour Louis Henri de la Tour d'Auvergne, comte d'Évreux.

[Note pour la petite histoire :  Pour s'assurer un train de vie en accord avec son rang, le comte d'Évreux avait épousé la fille de l'homme d'affaires Antoine Crozat, ce qui lui apportait une dot de 2 000 000 livres qui lui permettait de financer son hôtel. Elle a alors douze ans et lui trente-deux. Le souci des nobles de la fin du règne de Louis XIV est alors de trouver de l'argent, dépensé dans les fastes de la Cour et les guerres ; le souci des bourgeois, de s'élever socialement : cette union est un exemple de ce qui avait souvent cours en ces temps. Mais le comte, désirant rester célibataire et fortuné, congédia sa jeune épouse le 14 décembre 1720, le jour du bal de l'inauguration de l'hôtel auquel assistait sa maîtresse la duchesse de Lesdiguières... Ce palais sera donné plus tard, en 1753, en cadeau par Louis XV à sa favorite la marquise de Pompadour...(source : Wikipédia) ]

- Le Sénat, dans le palais du Luxembourg, construit au début du XVIIe siècle sur le domaine dit "de Luxembourg" pour la régente Marie de Médicis, qui s'y installa en 1625 avant la fin des travaux, la partie droite du palais étant réservée à la reine mère et celle de gauche à son fils le roi Louis XIII.

- Matignon, dans l'hôtel de Matignon, construit en 1722 pour Christian-Louis de Montmorency-Luxembourg, prince de Tingry, qui le revendra en 1723, en voie d'achèvement, à Jacques de Goyon, sire de Matignon, comte de Torigny.

- Le ministère de la Justice, dans l'hôtel de Bourvallais, place Vendôme, construit en 1699 pour Joseph Guillaume de La Vieuville et son beau-père Alexandre Lhuillier, l'un des financiers à l'origine de la place.

- Etc. etc.

L'Hôtel de ville de Paris a une autre histoire. Il s'élève sur l'emplacement même de la modeste "Maison aux piliers" acquise en 1357 sur la Place de Grève par le prévôt des marchands Étienne Marcel, pour servir de siège à la municipalité parisienne [Les marchands, qui détenaient le monopole du transport fluvial, s'étaient rassemblés dans la puissante corporation des Nautes, dont l'organisation fut à l'origine de la municipalité, et qui donnèrent à Paris leur emblème, la nef, qui figure sur le blason de Paris].

En 1533, les marchands commandèrent à l'architecte italien Dominique de Cortone, dit "le Boccador", un nouvel hôtel de ville somptueux, dont l'édifice Renaissance, retardé par les guerres de religion, achevé en 1628, était selon le voeu de François 1er  "des plus beaux que l'on saiche". C'est cet édifice, agrandi de 1837 à 1865, qui passait alors pour le plus beau palais de Paris, qui brûla sous la Commune le 24 mai 1871, et fut reconstruit de 1874 à 1882 en reprenant presque à l'identique la façade Renaissance.

Plus de 45 peintres et sculpteurs alors renommés ont contribué à la décoration des salons de l'Hôtel de ville, parmi lesquels Georges Bertrand, Jean-Paul Laurens, Jules Lefebvre, le symboliste Puvis de Chavannes [qui a oeuvré également à la décoration de la Sorbonne - mais les grands noms de l'impressionnisme sont absents]. Les Salons consacrés aux Sciences, aux Arts et aux Lettres, la Galerie des Métiers, la Salle des Fêtes [copiée sur la Galerie des Glaces du château de Versailles, moins longue mais plus haute et plus large] - partout les décors sont somptueux. Il n'est pas jusqu'aux bureaux de Monsieur le Maire et ses adjoints pour ne faire penser, avec tous ces décors, à l'apparat monarchique qui semble hanter notre démocratie, jusqu'à lui faire reproduire ce dont elle n'a pas hérité directement.

Certes cet Hôtel de ville, ces palais de la République, servent de garde-meubles, et donc ont leur fonction pour la conservation du patrimoine.

Mais qu'en est-il de l'exercice de la démocratie, dans ces lieux, cet apparat ? Je peine à imaginer nos "représentants du peuple", ne pas à la longue se tromper quelque peu de représentation.

 

 Plafond d'un des Salons de l'Hôtel de ville de Paris

 

Decorum de la Salle des Fêtes

 

 Bureau de Monsieur le Maire

 

 

 

 

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22/09/2012
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