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Voyage aux confins de l'Univers (I) L'avenir du futur

 

 

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« Il faut que l’imagination prenne trop pour que la pensée ait assez »
Gaston Bachelard
 
 
 
L’été souvent l’on rêve de grands départs. L’envie me prend quant à moi d’entreprendre un grand voyage, immobile certes, et sans destination, mais étrange et très lointain, une grande traversée où change jusqu’à la perception que nous avons des choses, du temps et de l’espace : un voyage imaginaire aux confins de l’Univers. 
Ce sera comme feuilleter un grand livre, qui sans doute à la fin nous laissera sur des interrogations, mais n’est-ce pas là le propre d’un bon livre ? comme le dit l’auteur du « Chat du rabbin » : « Si vous êtes satisfait à la fin d’un livre, ce n’est pas bon. Il faut que vous finissiez un livre avec un point d’interrogation, avec une question ».
 
Le voyage commencera par une exploration très en avant : vers quoi va l’Univers ? est-il éternel ou va-t-il vers une fin inéluctable ? Les dernières découvertes de la science permettent-elles de répondre à ces questions ? Ensuite ce sera comme un retour vers les origines : d’où vient l’Univers ? a-t-il été créé ou existe-t-il de toute éternité ? S’il y a eu un commencement, sous quelle forme ? Que nous racontent les débuts ? Qu’est-ce que cela implique pour les vivants que nous sommes ?
 
Vaste programme… Ce voyage imaginaire, je le ferai en compagnie de quelques grandes figures scientifiques, dont les découvertes ont éclairé le chemin. Certaines de ces figures sont très connues, comme Albert Einstein, d’autres moins, comme Sadi Carnot, Rudolf Clausius, ou Alexander Friedmann, Georges Lemaître, d’autres encore — tous ont été pionniers dans ces matières et leurs contributions ont été décisives pour la connaissance de l’Univers.
 
 
 
 
L’Univers que nous habitons est immensément vaste, et nous sentons bien que la Terre, le système solaire, notre chez nous pour ainsi dire, n’est qu’une infime partie d'un ensemble de galaxies dont nous peinons à concevoir le nombre, sans doute des milliards, qui existent à des distances qu’on imagine infinies — mais ce n'est qu'une façon de parler, car dans la réalité matérielle l’infini n’existe pas. L’Univers en tant que réalité matérielle est fini (on peut donner des chiffres "infiniment" grands, ce sont toujours des quantités finies)... Si l'Univers est borné, quid au-delà de ces bornes ? Impossible de le penser, car l’espace, comme aussi le temps, et la matière, sont précisément liés à l’existence de l’Univers…
 
Cette perspective quelque peu déstabilisante, nous la devons à Einstein qui, dans la première version de sa théorie, appelée « relativité restreinte », publiée en 1905, postule que la vitesse de la lumière est une constante et un absolu indépassable dans notre Univers, alors que le temps et l’espace sont au contraire relatifs — travaux complétés en 1917 par sa théorie dite de la « relativité générale », dont le champ d’application s’étend à l’Univers, et qui théorise que l’espace, le temps et la matière sont liés, et que la présence de matière ou d’énergie déforme l’espace-temps. Des tests expérimentaux réalisés par des horloges astronomiques confirmeront en 1954, un an avant la mort d’Einstein, la justesse de sa théorie sur la distorsion de l’espace-temps.
 
Mais si matière, espace et temps sont ainsi liés, c’est qu’en dehors de la matière, il n’y a ni espace ni temps. La question de l’origine et de la fin de l’Univers devient vertigineuse... Commençons par le dénouement : l’Univers aura-t-il une fin ?
 
Longtemps il a été admis que l’Univers, créé de toute éternité, ne pouvait avoir de fin. Mais les choses ont changé dans les décennies qui ont suivi les recherches de Sadi Carnot dans les années 1820 — recherches apparemment fort éloignées de notre sujet, puisque ce jeune ingénieur s’intéressait au moteur thermique… Dans son unique ouvrage Réflexion sur la puissance motrice du feu et sur les machines propres à développer cette puissance, Carnot pose les fondements d’une discipline entièrement nouvelle, qu’on appellera la thermodynamique. C’est à Carnot que l’on doit l’exposé raisonné du moteur thermique, à la base du fonctionnement des moteurs à combustion et à réaction. Pas mal ! Mais son oeuvre reste inachevée : il meurt à 36 ans, en 1832.
 
Et c’est dans la lignée des travaux théoriques de Carnot, qu’il reprend, que Rudolf Clausius postule, en 1865, une loi universelle qui affirme que, sans apport extérieur d’information ou d’énergie, tout système isolé voit grandir de manière irréversible ce que Clausius nomme son « entropie » (du grec entropê, "action de se transformer") au cours de l’évolution d’un état d’équilibre initial vers un état d’équilibre final. Clausius énonce ainsi un postulat, qui sera bientôt appelé « le second principe de la thermodynamique ». 
 
Le concept d’entropie, issu des recherches de Carnot et Clausius, fournit un outil théorique majeur, appliqué à l’Univers considéré comme un système isolé, pour comprendre que l’entropie ne faisant que croître indéfiniment, ceci impose que l’Univers ait une fin ! L’Univers n’a qu’une issue : la « mort thermique » ! En vertu de cette loi, toutes les étoiles vont progressivement s’éteindre et disparaître… d’ici plusieurs milliards d’années. Difficile à imaginer, et accepter, mais imparable. Aucune autre issue possible.
 
[Le second principe de la thermodynamique appliqué à l’échelle de l’Univers a une autre conséquence, concernant le commencement cette fois-ci. Si l’on regarde vers le passé, l’Univers a forcément eu un début, car s’il existait de toute éternité, il se consumerait depuis l’éternité, et cela est impossible dans un système fermé selon le second principe de la thermodynamique. L’Univers a donc eu nécessairement un début, selon ce principe ! Nous y reviendrons dans une étape ultérieure.]
 
Que l’Univers ne soit pas stable mais évolue, cela ne pouvait entrer dans les vues d'Anciens comme Aristote (384-322 av. J.-C.) par exemple, qui affirmait (et cette affirmation a été longtemps implicitement acceptée par la communauté scientifique, jusque qu’aux débuts du XXᵉ siècle) : « Le cosmos est toujours le même, dans le passé comme dans l’avenir. » Mais voilà. Non seulement la théorie (le second principe de la thermodynamique) mais les observations vont confirmer que l’Univers n’est pas stable.
 
Car cette idée, issue de recherches théoriques, que l’Univers est en évolution, s’est trouvée validée en 1929 par les observations astronomiques (cette fois-ci on n’est plus dans la théorie) de Edwin Hubble (dont on a donné le nom au télescope spatial) qui a fait deux découvertes majeures : — 1) les galaxies visibles dans notre Univers ne sont pas immobiles mais se déplacent —  2) les galaxies s’éloignent toutes les unes des autres ; et plus elles sont distantes, plus elles s’éloignent rapidement. De là la conclusion : « L’Univers est en expansion. » 
 
Cette idée d’Univers en expansion a heurté bien des esprits, à commencer par celui d'Einstein, dans sa première période : cela n’entrait pas dans ses vues ! Il pensait que l’Univers est de dimension statique, c’est-à-dire sans début ni fin. Il en vint même, pour se persuader que l’évolution n’est pas possible, à inventer une « constante cosmologique »… Las ! les observations de Hubble montrèrent que l’Univers est effectivement en expansion ! Einstein reniera plus tard sa constante cosmologique , « la plus grande bévue de ma carrière », reconnaîtra-t-il.
 
À vrai dire, dès 1923, un jeune cosmologiste russe, Alexander Friedmann, avait mis en cause la pertinence de la constante cosmologique d’Einstein. En se fondant sur les travaux d’Einstein lui-même, il publia la première théorie d’un Univers en expansion. Quelques années plus tard, en 1927, un autre jeune scientifique, le jésuite Georges Lemaître, astronome et physicien belge, publia sa thèse exposant la théorie de l’expansion de l’Univers. Aussi « absurde et incroyable » que pouvait paraître cette théorie aux yeux de nombre de détracteurs, les observations astronomiques de Hubble confirmèrent l’expansion de l’Univers telle que Friedmann et Lemaître l’avait prédite sur la base de la théorie de la relativité générale d’Einstein.
 
Les cosmologistes américains Paul Perlmutter, Brian P. Schmidt et Adam Riess ont plus récemment, en 1998, mis en évidence le phénomène d’accélération de l’expansion de l’Univers (cela leur valut le prix Nobel de physique en 2011) : les galaxies s’éloignent de plus en plus rapidement les unes des autres. L’Univers est donc non seulement en expansion, mais cette expansion s’accélère.
 
La phase d’expansion durera plusieurs milliards d’années (les spécialistes avancent le chiffre de 100 000 milliards d’années)… De quoi alimenter à l’infini notre imagination qui finit par se perdre dans ce tourbillon de chiffres… Au-delà, ce sera inéluctablement la "mort thermique" de l’Univers...
 
 
À  suivre


04/07/2022
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